l'indice de démocratie de l'Economist

Le Canada perd du terrain dans l’indice de démocratie de l’Economist : le rapport met en garde contre un glissement vers des problèmes de type américain.

L’Economist Intelligence Unit vient de publier son indice annuel de démocratie. Cette année, le Canada a encore reculé, passant de la 12e à la 13e place (après être passé l’an dernier de la 5e à la 12e place).

Les cinq premières démocraties du monde – la Norvège, la Nouvelle-Zélande, la Finlande, la Suède et l’Islande – utilisent toutes la représentation proportionnelle. 

En fait, neuf des dix premiers pays utilisent la représentation proportionnelle. 

Le rapport note que la baisse du score moyen de l’indice pour l’Amérique du Nord « est due à l’évolution du Canada, dont le score a baissé de 0,19 point ». 

Ils notent que :

« Le Canada semble de plus en plus souffrir des mêmes déficits démocratiques que son voisin du sud... La polarisation est devenue une caractéristique croissante de la politique canadienne… »

Il y a tout juste deux ans, le rapport 2021 sur l’indice de démocratie lançait un avertissement sévère : nos problèmes politiques ressemblent de plus en plus à ceux qui se sont enracinés aux États-Unis :

La forte baisse du score moyen de l’Amérique du Nord en 2021 est principalement due à une détérioration au Canada… De nouvelles données d’enquête montrent une tendance inquiétante à la désaffection des citoyens canadiens pour les institutions démocratiques traditionnelles et un soutien accru à des alternatives non démocratiques, telles que le gouvernement par des experts ou par l’armée.

La détérioration du score du Canada soulève la question de savoir s’il ne commence pas à souffrir des mêmes afflictions que son voisin américain, telles que des niveaux extrêmement bas de confiance du public dans les partis politiques et les institutions gouvernementales.

Malheureusement, les dirigeants politiques partisans qui ont le pouvoir d’agir continuent d’ignorer ce qui est de plus en plus évident et alarmant pour les experts et les Canadiens.

Le 7 février, les dirigeants du Parti libéral et du Parti conservateur ont fait front commun pour bloquer une mesure visant à remédier à ces tendances inquiétantes en s’opposant à la motion M-86 en faveur d’une Assemblée nationale citoyenne indépendante et non partisane sur la réforme électorale. La motion était soutenue par des groupes non partisans tels que Generation Squeeze, le Samara Centre for Democracy et Apathy is Boring.

Parmi les ministres qui ont voté NON, il y avait ceux qui étaient en faveur d’une Assemblée nationale citoyenne sur la réforme électorale dans un passé récent, avant qu’ils ne deviennent ministres. 

Ce qui est le plus étonnant dans le vote sur la motion M-86, c’est que 39 députés libéraux et 3 députés conservateurs ont fait preuve de courage et d’audace en votant quand même en sa faveur. 

Il est extrêmement rare qu’autant de députés appartenant au parti au pouvoir votent différemment du gouvernement. Les députés suivent la ligne du parti dans plus de 99 % des cas.

Même s’il s’agit d’un « vote libre » et que les députés sont autorisés à voter différemment, les incitations et la pression informelle pour voter avec l’équipe du parti peuvent être intenses.

Par exemple, au cours de cette législature, il y a eu 14 autres votes sur des motions d’initiative parlementaire. Le nombre de députés libéraux ayant voté différemment du gouvernement sur l’une d’entre elles avant la motion M-86 était de zéro.

Chez les conservateurs, tous les députés du cabinet fantôme qui ont voté (à l’exception du député Ben Lobb, qui avait soutenu la motion) ont voté en faveur de la position du parti conservateur, qui est de s’opposer à une assemblée citoyenne.

Il s’agit notamment de plusieurs députés conservateurs qui avaient dit à leurs électeurs qu’ils étaient en faveur de la motion, et même d’une députée qui avait déclaré qu’elle voterait certainement en faveur de la motion et qui a reconnu que le travail des électeurs l’avait fait changer d’avis.

Les trois députés conservateurs qui ont voté en faveur de la motion M-86 méritent d’être félicités pour avoir donné la priorité aux préoccupations qu’ils ont entendues dans leurs communautés plutôt qu’à la ligne du parti.

Les députés libéraux et conservateurs qui ont voté en faveur de la motion M-86 n’ont pas voté contre leur parti ou leur chef. 

Ils ont défendu une démocratie plus juste et plus inclusive. 

L’indice de démocratie de cette année a révélé que la seule région du monde à avoir amélioré son score était l’Europe occidentale. Sur les 21 pays d’Europe occidentale, seuls deux n’ont aucun élément de représentation proportionnelle dans leur système électoral. Les scores de ces pays sont restés inchangés ou ont baissé, ce qui signifie que l’amélioration est venue des pays qui utilisent la représentation proportionnelle.

L’indice 2020 de satisfaction à l’égard de la démocratie de l’université de Cambridge a trouvé sept pays qu’ils décrivent comme un « îlot de contentement » dans la tempête, où la satisfaction à l’égard de la démocratie a en fait augmenté. Les auteurs font référence à des recherches bien établies qui montrent que les citoyens des pays à représentation proportionnelle sont plus satisfaits de leur démocratie, même si le parti qu’ils ont soutenu n’est pas au pouvoir. 

En 2020, 97 % des Canadiens interrogés par Léger ont déclaré qu’ils souhaitaient un système électoral dans lequel les partis collaborent davantage dans l’intérêt commun.  

Dans un sondage EKOS réalisé en 2022, 76 % des personnes interrogées, tous partis confondus, ont soutenu l’idée d’une Assemblée nationale citoyenne sur la réforme électorale. 

Comme l’a déclaré la députée Julie Dzerowicz quelques semaines avant de voter en faveur de M-86 : 

« Je pense que la plupart des gens pensent que notre système électoral a vraiment besoin d’une révision massive en ce moment.

Il y a vraiment un combat à mener pour continuer à améliorer notre démocratie, non seulement ici au Canada, mais aussi dans le monde entier. 

Ce n’est qu’une question de temps avant que nous ayons une Assemblée nationale citoyenne sur la réforme électorale au Canada ».

Dans l’intérêt de tous les Canadiens, nos dirigeants politiques doivent se mettre à la tâche.

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