La représentation proportionnelle au Canada est-elle synonyme d’un système en vertu duquel les députés n’ont de compte à rendre à personne?

La réponse est non.

Les détracteurs de la représentation proportionnelle au Canada prétendent souvent que faire en sorte que chaque vote compte entraînera une perte de l’« imputabilité des députés ». Ils font souvent référence aux « députés nommés » et aux « amis des partis figurant sur les listes ».

Ils affirment que le lien entre un représentant élu en vertu d’un SMUT et sa circonscription est spécial et unique. Cette affirmation est souvent faite sans vraiment tenir compte de ce que les électeurs pourraient attendre de leurs représentants et ne prend pas les autres options en considération. La force du lien qui unit les citoyens à leur représentant dans un SMUT ou dans un système proportionnel dépend de la perspective de chacun quant à savoir si un député désert mieux les électeurs dans des circonscriptions à un ou à plusieurs membres.

Lors de chaque élection selon le SMUT, plus de la moitié des citoyens ne sont pas en mesure de faire élire un candidat qui représente leurs valeurs. Avec les élections de 2015, notre système électoral basé sur le SMUT a permis au parti rassemblant le plus de députés de détenir les pleins pouvoirs en remportant une « majorité » avec seulement 18 % de tous les votes.

De surcroît, en vertu du SMUT, de nombreux sièges sont considérés comme des sièges assurés, suggérant une absence de concurrence en période électorale. Ces sièges assurés incitent peu leurs titulaires à faire les efforts requis pour représenter leurs électeurs.

Ces statistiques nous amènent à poser une question : combien d’électeurs sont actuellement représentés par des députés imputables et à qui les députés doivent-ils rendre des comptes en vertu de notre système électoral SMUT?

Qu’entendent-ils par « députés imputables » et qui en tire avantage?

Au Canada, les députés n’ont pas de description de tâches. Alors, comment évaluer leur responsabilité? Au nombre de séances d’information sur les passeports organisées? Au nombre de cartes d’anniversaire envoyées? Au nombre de projets de loi d’initiative parlementaire adoptés? Au nombre de projets d’infrastructure pour lesquels il ou elle a obtenu le financement nécessaire?

La question est très subjective.

Plusieurs laissent entendre qu’un système proportionnel au Canada impliquera un système à listes fermées, où les partis nomment des candidats, contournant ainsi le mécanisme de nomination locale.

Qu’en est-il des faits?

Il est important de savoir que la représentation proportionnelle regroupe un ensemble de systèmes qui assurent une représentation proportionnelle aux votes, permettant ainsi à la plupart des électeurs d’élire un représentant qui défend leurs valeurs. Il n’est pas ici question de proposer pour le Canada un système électoral semblable à celui utilisé en Israël, qui a adopté un système à listes fermées à l’échelle du pays. Une telle option est tout à fait inadéquate et n’a d’ailleurs jamais été suggérée par qui ce soit.

Ce n’est que dans quelques pays que les députés sont « nommés » à des sièges par le parti. Dans presque tous les cas, les candidats sont choisis au moyen d’un processus de nomination mené par le parti et doivent faire campagne comme les candidats actuels.

Les systèmes proportionnels supposent des circonscriptions représentées par plusieurs membres. Le fait d’avoir plusieurs députés dans une même région permet de créer une dynamique de saine concurrence. Les députés doivent attirer une grande variété d’électeurs pour être élus et choisiront de s’associer à d’autres en vue d’obtenir les meilleurs résultats. Les députés qui travaillent dur pour leurs électeurs seront récompensés en période électorale.

Cette dynamique à plusieurs membres limite également la partisaneriepartisannerie, étant donné qu’aucun député ne contrôle une circonscription. Les candidats doivent donc établir un consensus sur les réformes, ce qui favorisera des électeurs.

La plupart des partisans d’une réforme de notre système électoral s’entendent pour dire que nous avons besoin d’un système de représentation proportionnelle purement canadien. Alors que plus de 90 pays ont adopté une forme de représentation proportionnelle, le Canada pourrait s’appuyer sur les meilleures pratiques utilisées dans le monde entier pour mettre au point son nouveau système.

Il est important de souligner qu’aucun parti ou groupe ne propose un mode de scrutin à listes fermées pour le Canada. Les listes fermées ne figurent pas parmi les propositions.

La Commission du Droit du Canada, dans son rapport de 2004 intitulé « Un vote qui compte : la réforme électorale du Canada» [PDF en anglais], a recommandé la représentation proportionnelle mixte à listes ouvertes. Une liste ouverte signifie que les électeurs choisissent les candidats régionaux du parti qu’ils préfèrent. Grâce aux listes ouvertes, tous les députés, élus au niveau local ou régional, sont élus par les citoyens.

Les candidats figurant sur la liste ouverte d’un scrutin à RPM ne sont pas « nommés », mais sont élus au cours d’une assemblée d’investiture qui réunit les membres d’un parti. Les nominations locales peuvent se faire par vote en personne ou en ligne.

Pour en apprendre davantage sur la RPM, visionnez ces deux vidéos :

Modèle de la Commission du Droit, [en anglais]

Modèle Jenkins avec scrutin préférentiel [en anglais]

Blogue détaillé au sujet de la RPM au Canada. [en anglais]

Le vote unique transférable (ou VUT) est une autre option. Il s’agit d’un système proportionnel qui utilise le mode de scrutin préférentiel dans une circonscription à plusieurs membres pour élire une équipe de députés locaux.

Par exemple, 5 circonscriptions à membre unique, chacune ayant recours à un mode de scrutin majoritaire uninominal, sont regroupées en une seule circonscription qui élit 5 députés.

Ainsi, les résultats proportionnels refléteront le choix des électeurs et la diversité de la circonscription. Dans certaines circonscriptions, un parti demandera à plusieurs députés de faire campagne dans le cadre d’un scrutin préférentiel. Les électeurs pourront choisir parmi les candidats d’un même parti ou de tous les partis, autant qu’ils le désirent.

Comme dans le cas de la RPM, le VUT favorise aussi la concurrence au niveau local, encourageant ainsi les candidats à fournir un service de grande qualité aux électeurs de chaque siège. Les candidats au VUT ne sont pas « nommés », mais sont élus à l’occasion d’une assemblée d’investiture qui réunit les membres d’un parti.

Pour en apprendre davantage au sujet du VUT et du VUT+, consultez cette documentation :

Vidéo au sujet du VUT [en anglais]

Site Web et blogue Vote unique transférable au Canada [en anglais]

La politique de nomination démocratique de Représentation équitable au Canada

Aujourd’hui, bien que la plupart des députés sont nommés démocratiquement par les membres du parti, nous sommes conscients qu’il existe de rares situations où la permanence ou le chef d’un parti décide de bloquer le candidat favori des membres locaux pour parachuter leur candidat vedette.

Afin de décourager ce type de pratique, peu importe le système, Représentation équitable au Canada propose d’apporter une légère modification au financement des candidats. À l’heure actuelle, si un candidat obtient 10 % des voix dans sa circonscription, il est admissible à un remboursement de 60 % de ses dépenses de campagne. Représentation équitable au Canada propose que les candidats ne soient admissibles à ce remboursement payé par les contribuables que s’ils sont élus démocratiquement par les membres locaux du parti.

Cette politique permettrait d’autoriser parfois, dans certaines régions, un parti très faible qui pourrait manquer de membres locaux pour tenir une assemblée d’investiture à nommer un candidat symbolique afin d’assurer sa présence sur le bulletin de vote. Ces candidats recueillent rarement un pourcentage de voix se rapprochant des 10 % nécessaires pour être admissibles au remboursement. Par conséquent, cette politique ne pénalise pas les partis qui ont recours à cette pratique, mais elle contribue à inciter la nomination démocratique de tous les candidats au Canada.

Conclusion au sujet des députés imputables

Tous les systèmes proportionnels proposés pour le Canada, qu’il s’agisse du vote unique transférable ou de la représentation proportionnelle mixte, obligent les députés à faire face aux électeurs, à être élus par les citoyens, et à leur rendre des comptes.

Lors des dernières élections fédérales, 52 % des électeurs n’ont élu aucun député. Aujourd’hui, de nombreux Canadiens estiment que le député élu dans leur circonscription ne les représente pas et n’est pas imputable vis-à-vis d’eux.

La RP permet à presque chaque électeur du Canada d’élire un député local qui partage ses valeurs. Si l’électorat est représenté par des députés locaux et régionaux élus par RPM ou par une équipe de députés locaux élus par VUT, la collaboration et la concurrence entre les députés de la circonscription n’en seront que meilleures, ce qui favorisera l’imputabilité des représentants locaux et donc de meilleurs services aux électeurs.

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