Le comité multipartite sur la réforme électorale (ERRE) vient de terminer quatre mois de consultations d’experts et du public. Il fera ses recommandations au gouvernement d’ici le 1er décembre.

De tous les témoins ayant pris position face aux systèmes électoraux, 88% ont recommandé la représentation proportionnelle. Ceci est en harmonie avec les conclusions de décennies de recherches internationales et de treize processus antérieurs de réforme électorale au Canada, dont deux comportant des assemblées citoyennes impartiales et représentatives.

Lorsque le gouvernement a lancé le processus de consultations actuelles sans y associer un mécanisme pour cumuler les résultats, Représentation équitable au Canada, une organisation multipartite, s’est engagée à suivre le processus de près. Nous transmettons les résultats de ce travail aux médias car nous croyons que le processus se doit d’être transparent et imputable.

(Vous trouverez les principaux résultats de notre travail ci-dessous assortis de liens à nos feuilles de suivi.)

En dépit de l’appel non-équivoque qu’on observe pour la représentation proportionnelle dans toutes les plateformes de consultation, nous craignons que la réforme du système électoral ne soit mise en péril en raison de commentaires récents du Premier ministre Trudeau et de la ministre Monsef.

Le président de Représentation équitable au Canada, Réal Lavergne, exprime ainsi la préoccupation du mouvement : « Nous sommes inquiets d’entendre la ministre et le Premier ministre affirmer que nous ne pouvons pas compter sur eux pour honorer la promesse du gouvernement que chaque vote doit compter. Or, les Canadiennes et Canadiens ainsi que des experts en la matière se sont clairement prononcés en faveur de la représentation proportionnelle, la seule vraie façon de s’assurer que chaque vote compte ».

David Merner, vice-président de Représentation équitable au Canada et un candidat libéral aux dernières élections fédérales, ajoute que «  Ce n’est pas le moment de faire marche arrière. Le Premier ministre et la ministre des Institutions démocratiques ont personnellement contribué à créer un sentiment d’espoir chez les Canadiennes et Canadiens en mettant de l’avant la promesse électorale libérale de 2015 pour un vrai changement. Des millions d’électeurs ont cru que le gouvernement comptait tenir ses promesses. Nous avons cru que le cynisme politique des années Harper était derrière nous et des milliers d’entre nous ont participé à la consultation du gouvernement de bonne foi ».

Merner affirme que « C’est maintenant, pour le gouvernement, le moment d’honorer ses promesses ».

Le stratège conservateur de renom et porte-parole de l’Alliance « chaque électeur et électrice compte » Guy Giorno ajoute que « les membres du comité sur la réforme électorale se doivent d’appuyer la meilleure solution pour le bien des Canadiennes et des Canadiens, et non celle qui bénéficierait à un parti en particulier. Étant donné l’abondance des arguments déposés devant le comité, la seule option légitime est de recommander la représentation proportionnelle. Souvenons-nous aussi que la réforme électorale était un enjeu majeur lors de la dernière élection et que les électeurs ont exprimé massivement leurs voix en faveur de partis qui promettaient le changement ».

Les témoignages d’experts en faveur de la représentation proportionnelle ont résonné dans des centaines d’assemblées et discussions publiques à travers le pays.

Au cours des prochains jours, le comité ERRE élaborera une recommandation pour un nouveau système électoral au Canada. Son rapport final est attendu pour le 1er décembre.

Selon Réal Lavergne « dès lors qu’une recommandation aura été apportée, il appartiendra à la ministre de la faire valoir et au gouvernement d’y donner suite. Un leadership fort sera nécessaire pour éduquer à la fois le public et les parlementaires et pour promouvoir la réforme proposée ».

« Si on se fonde sur les résultats de la consultation des experts et des citoyens, la seule option légitime pour le comité est de recommander la représentation proportionnelle ».

Indicateurs clés tirés des audiences du comité

88 % des témoins experts ayant exprimé une préférence étaient en faveur de la représentation proportionnelle.

4 % d’entre eux se sont prononcés en faveur du mode de scrutin préférentiel uninominal (un système majoritaire qui aurait tendance à évoluer vers un système à deux partis, qui favoriserait souvent les partis centristes, et qui pourrait aggraver les distorsions de notre système majoritaire actuel.)

67 % ont affirmé qu’un référendum n’était pas souhaitable ou nécessaire.

On retrouvera une analyse détaillée dans notre synthèse des positions prises par les témoins au comité ERRE.

Les séances à micro ouvert

D’un océan à l’autre, les Canadiennes et Canadiens ont défilé aux séances à micro ouvert pour demander au comité de tenir la promesse de faire compter chaque vote et recommander la représentation proportionnelle.

Des 428 participants ayant pris la parole, 374 (87,4%) ont réclamé la représentation proportionnelle.

Assemblées publiques des députés

Nombre total de rapports d’assemblées publiques: 173.

Les données suivantes indiquent le niveau d’appui observé pour la représentation proportionnelle dans les assemblées publiques des députés :

69,4 % des assemblées publiques (121) : une majorité demandant la représentation proportionnelle.

9,2 % des assemblées publiques (16) : une majorité en faveur de réformes électorales, mais pas de majorité claire pour la représentation proportionnelle

5,2 % des assemblées publiques (9) : un appui divisé pour un système majoritaire ou la représentation proportionnelle.

5,7 % des assemblées publiques (10) : une majorité pour le statu quo.

8,1 % des assemblées publiques (14) : des rapports ne permettant pas d’identifier une prise de position majoritaire quelconque.

2,9 % des assemblées publiques (5) : un appui majoritaire pour le mode de scrutin préférentiel uninominal.

On retrouvera une analyse détaillée des résultats ici. 

Événements et assemblées organisées par des citoyens et groupes communautaires

Voici les indicateurs des 31 événements ou assemblées publiques organisés par des citoyens et groupes communautaires affichés sur le site web du ERRE ou pour lesquels nous avons pu obtenir d’autres informations jusqu’à présent :

Nombre total de participants: 1 295.

83,9 % des événements) (22) : une majorité demandant la représentation proportionnelle.

9,7 % des événements (2) : une majorité en faveur de réformes électorales, mais pas de majorité claire pour la représentation proportionnelle.

6,5 % des événements (3) : des rapports ne permettant pas d’identifier une prise de position majoritaire.

Nous savons qu’au moins 15 à 20 autres événements communautaires ont eu lieu, mais les rapports pour celles-ci ne sont pas encore affichés sur le site web du ERRE.

On retrouvera une analyse détaillée des résultats ici. 

Les assemblées publiques de la ministre Monsef

La ministre Monsef a organisé deux types d’assemblées publiques : certaines dans sa propre circonscription et d’autres dans le cadre d’une tournée pancanadienne. Voici un extrait du rapport soumis au ERRE sur les assemblées publiques tenues par la ministre Monsef dans sa circonscription de Peterborough-Kawartha :

« …il y a manifestement chez l’électorat la volonté d’apporter des changements réfléchis au système électoral…

Si les opinions relatives aux divers systèmes électoraux ont varié, la plupart des participants ont néanmoins révélé leur appui à un processus électoral davantage proportionnel, sans compromettre le besoin d’une représentation locale ni la simplicité du vote. »

Bien que la ministre Monsef ait réalisé régulièrement un vote informel sur des enjeux tels que le vote obligatoire et le vote en ligne lors des assemblées publiques, elle ne l’a généralement pas fait à propos de la représentation proportionnelle. Des bénévoles de Représentation équitable au Canada ont néanmoins assisté à ces événements à travers le pays et ont partagé leurs opinions. Voici quelques observations des participants :

Toronto: « La représentation proportionnelle était très clairement le principal enjeu pour la majorité des participants. Plusieurs participants en faveur de la représentation proportionnelle en parlaient avec passion et éloquence. Si certains participants présents s’y opposaient peut-être, aucun n’a été assez résolu pour exprimer son point de vue. »

Vancouver: « Il apparaît que 90% de l’auditoire… voulait une forme de représentation proportionnelle. »

Edmonton: « La plupart des gens semblaient appuyer une forme de représentation proportionnelle. »

Yellowknife: « La ministre a demandé aux participants s’ils préféraient garder le mode de scrutin majoritaire uninominal à un tour (SMUT), ou s’ils préféraient la mise en place d’un système préférentiel, du vote unique transférable, de proportionnelle mixte ou alors de représentation proportionnelle pure. Un participant a voté pour le SMUT. Plusieurs ont voté pour la proportionnelle mixte et quelques-uns pour la représentation proportionnelle pure. »

Yukon: « Quelques Yukonnais se sont prononcés en faveur de notre mode de scrutin actuel (SMUT); ils étaient plus nombreux à réclamer un changement vers un système de représentation proportionnelle »

Halifax: « Les commentaires des groupes de discussion favorisaient clairement la représentation proportionnelle. »

Montréal: « Il y avait un appui écrasant en faveur de la représentation proportionnelle dans la pièce. »

Thunder Bay: « De la douzaine de personnes qui ont pris la parole, tous se sont prononcées en faveur de la représentation proportionnelle. »

Gatineau: « Les participants ont parlé de la représentation proportionnelle à chaque occasion… Cependant, le format de la rencontre rendait cela difficile… En tenant compte des interventions qui ont abordé le sujet de la représentation proportionnelle par opposition au SMUT ou au mode de scrutin préférentiel uninominal, une forte majorité – de l’ordre de 70% ou plus – étaient en faveur de la représentation proportionnelle. »

Waterloo: D’après le rapport de 4 députés : « Tous les groupes ont discuté de la nécessité, pour notre nouveau système électoral, d’avoir un certain degré de proportionnalité. »

Charlottetown: « Environ 90% des gens présents étaient en faveur de la représentation proportionnelle. »

Winnipeg: « Trois personnes étaient en faveur de notre mode de scrutin uninominal majoritaire actuel car elles craignaient de perdre la représentation locale. Tous les autres ont exprimé une préférence pour un système ou l’autre ayant une composante proportionnelle. »

Happy Valley-Goose Bay: « Ce que nous avons dit était que nous voulions la représentation proportionnelle, MAIS elle devait être d’un type hybride qui considère la faible population sur d’immenses territoires, non seulement le Labrador mais 60% du Canada, c’est-à-dire tout le nord. »

Calgary: « Il y avait un appui écrasant à l’idée de se défaire du système actuel, avec quelques groupes mentionnant le vote unique transférable ou la proportionnelle mixte comme leur premier choix. »

En conclusion

Pour conclure, voici une citation éloquente d’un bénévole de Représentation équitable au Canada à l’assemblée publique de Victoria, où la ministre a dit qu’elle ne pouvait promettre qu’elle recommanderait la représentation proportionnelle, car elle « n’avait pas entendu s’exprimer une majorité écrasante en sa faveur pendant sa tournée du pays » :

Victoria: « Nous perdions nos moyens en cherchant à combattre le discours insidieux que nous recevions à l’assemblée publique sur la réforme électorale d’hier soir. Maryam Monsef, la ministre des Institutions démocratiques, organisait la rencontre à Victoria, sensée être notre « dernière chance » pour exprimer notre point de vue. Mais le ton de la rencontre était acrimonieux. Les organisateurs tentaient manifestement de contrôler le message tout en faisant marche arrière sur la promesse électorale de changer le mode de scrutin. La ministre est allée jusqu’à défendre les commentaires récents de Trudeau à l’effet qu’un changement n’était plus nécessaire puisque nous avions voté pour LUI. »

« Après des mois d’audiences de témoins experts par le comité proportionnellement multipartite et des consultations publiques de milliers de Canadiennes et de Canadiens organisées par les députés à travers tout le pays, devons-nous maintenant croire qu’il n’y a pas d’appétit pour la représentation proportionnelle? La ministre a affirmé qu’elle n’avait pas encore pris sa décision, mais ses paroles sont troublantes. Est-ce que le gouvernement minimisera l’importance du rapport bien documenté et démocratique du comité en décembre pour mettre de l’avant leur préférence prédéfinie? Pour plusieurs d’entre nous ayant assisté à la rencontre d’hier, la soi-disant consultation donnait l’impression de n’être qu’un simulacre. »

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